Mes chers amis, chers Borméens et Borméennes, en ce jour de fête nationale, à l’occasion de la cérémonie aux monuments aux morts, j’ai tenu à m’interroger et interroger les personnes réunies devant la stèle, hommage aux combattants.
Sommes-nous encore dignes des valeurs de la République portées par la Révolution Française ?
Représentent-elles encore quelque chose pour les Françaises et les Français ?
Sont-elles toujours le pilier commun sur lequel s’est bâtie notre démocratie ?
Nos compatriotes ont-ils encore foi en la Nation.
Liberté, égalité, fraternité, ces mots clés, fondateurs de la République, mots qui ont inspiré tant de démocratie de par le monde ont-ils encore du sens pour le peuple de France ?
Malheureusement j’ai le sentiment que le socle démocratique sur lequel chaque Français, de naissance ou naturalisé doit forger son appartenance à notre pays est devenu bien fragile. La pandémie que nous venons de vivre avec couvre-feu, confinement ou encore le pass sanitaire donne l’impression à certains que nos libertés régressent. Pire encore, nous-mêmes les mettons à mal, puisqu’avec plus de 2/3 d’abstention lors des dernières élections, la population renonce d’elle-même à sa liberté de choisir ses dirigeants. Mais j’y reviendrai.
Cette même population qui pense, à tort ou à raison que l’égalité n’est plus qu’un vain mot dans notre pays. Inégalités sociales, inégalités entre hommes et femmes, inégalités entre les territoires, inégalités entre les niveaux de revenus, mais aussi inégalités entre les différents régimes de protection sociale, de statuts ou de retraite. Même si des inégalités perdurent dans notre société, certains profitent de ce thème et l’utilisent comme fond de commerce, travestissant ainsi la vérité.
La fraternité enfin, est elle aussi mise à mal. Mais comment un pays peut-il être fraternel lorsque le sentiment d’inégalité prospère. Comment peut-il être fraternel lorsque certains passent leur temps à monter les Français les uns contre les autres, stigmatisant nos différences plutôt que de mettre en exergue nos points communs.
La perte du socle des valeurs communes amène à la création de communautés qui ont tendance à se refermer sur elles-mêmes. Les différences ethniques, religieuses, sociales, politiques, les orientations sexuelles, les régions d’origine, les différences entre les hommes et les femmes, tout devient prétexte au communautarisme, tout devient prétexte à la caricature de l’autre, tout devient prétexte à ne pas se respecter, tout devient prétexte à s’enfermer dans son propre ghetto, tout devient prétexte à revendiquer à propos de n’importe quel sujet. La conséquence est de ne plus reconnaître son appartenance à une nation, à un pays, à des valeurs et un référentiel communs à tous.
Bien triste constat pour un jour de fête nationale, mais comment pourrait-il en être autrement lorsque 68% de français ne vont pas voter. Ce chiffre monte à 87% chez les jeunes.
Comment des jeunes pourraient vouloir aller voter, lorsque leurs propres parents n’y vont pas et ne respectent pas les fondements de notre démocratie ? Comment des jeunes pourraient-ils s’intéresser à la vie publique lorsqu’ils entendent à la maison et au dehors, qu’aller voter ne changera rien, ne sert à rien ? Les parents ont-ils conscience des ravages que de tels propos ont sur notre jeunesse, nos valeurs, notre démocratie ?
Il faut accompagner nos jeunes lorsqu’ils sont en âge de voter, en faire un évènement, leur expliquer à quel point c’est important. Ces jeunes ont-ils conscience que notre histoire et le chemin parcouru par notre pays ont fondé notre nation telle que nous la connaissons aujourd’hui ?
Le droit de vote des femmes ne date que de 1944. Cela a été un long périple avant d’y arriver. Le vote dès 18 ans ne date que de 1974.
Que de combats pour aboutir à ces avancées démocratiques majeures ? Que de combats aujourd’hui oubliés par beaucoup. Voter n’est pas simplement un droit, c’est un véritable devoir civique. Mais, lorsque l’on estime que l’on a des droits, parfois même tous les droits et aucun devoir ou si peu, lorsque l’on attend de l’Etat qu’il garantisse son pouvoir d’achat en lieu et place de son propre travail, quand la perspective d’un revenu universel sans contrepartie séduit plus que l’apprentissage d’un métier, quand la notion même d'effort devient inenvisageable et condamnable, lorsque l’éducation, la culture, le sport, le bénévolat sont en souffrance, alors ce sont les signes que notre société est gravement malade.
Le constat est posé, il pourrait être bien plus exhaustif.
Quelles sont les solutions ? Je ne prétends pas donner de leçon, cependant, peut-être serait-il important de revenir à l’essence même de ce qui a fait la grandeur de la révolution Française, de ses idéaux, ceux qui ont inspirés toutes les grandes démocraties de ce monde.
Revenir aux fondamentaux des valeurs de la République, à ses symboles aussi : le drapeau, l’hymne et sa devise « Liberté, égalité fraternité » symbolisés par la Marianne.
Une femme pour symbole de la République Française, c’est un signe fort d’une vision démocratique et égalitaire très en avance sur son temps. Ne perdons pas cela.
Sans aller faire chanter l’hymne national chaque matin à l’école comme dans certains pays, insistons pour que nos grands sportifs le fassent. Ils ont valeur d’exemple. Demandons à nos artistes de nous aider à promouvoir la République. N’ayons pas peur ni honte d’arborer notre drapeau, remettons les valeurs et les symboles de la République à la mode. Profitons-en pour réexpliquer leur signification profonde. Seules la connaissance et la compréhension de notre histoire, de son évolution, de ses soubresauts, de ses grands moments ou de ses grandes avancées, de sa culture, des cultures, peuvent nous permettre de lutter contre cet abandon des valeurs de la République.
La commémoration du 14 juillet 1789 devenue fête nationale fait partie de ses grands moments de l’histoire, la prise de la Bastille restera éternellement comme le moment où une nation a voulu se fonder sur d’autres principes que ceux qui la régissaient jusqu’alors.
« Liberté, égalité, Fraternité » sont devenus les idéaux, les valeurs, les principes intangibles à défendre.
En cet été 1789, la France a grandi. Les avancées conquises en 90 jours ont transformé nos aïeuls. Ils étaient « sujets du roi de France », ils sont devenus « citoyens français ».
L’égalité, la propriété, la liberté individuelle, la liberté d’expression comme de conscience étaient garanties et considérées comme universelles et imprescriptibles. Là est l’esprit de la révolution.
Avec la nuit du 4 août, les privilèges de l’ancien régime se trouvaient abolis. Pour la première fois de son histoire, la France allait se doter d’une constitution. La première république était née. Là encore est l’esprit de la révolution.
Ces quelques semaines ont donc fait de la France, cette nation chérie parmi les nations, la championne des droits de l’homme et des peuples. Rien désormais ne sera plus pareil.
Que reste-t-il de cet héritage aujourd’hui ?
La grande majorité des français ont-ils conscience de ce qui s’est joué à ce moment-là et dont ils bénéficient toujours aujourd’hui ? Nous sommes les descendants de la Révolution Française, le patriotisme doit toujours avoir du sens. Mais attention à ceux qui tentent de transformer ce patriotisme en nationalisme ou en communautarisme.
Le patriotisme c’est l’amour de son pays.
Le nationalisme c’est la haine des autres,
Le communautarisme c’est le repli sur soi.
Liberté, égalité, fraternité, dans la société politique de cette époque, ces mots résonnaient comme une vision des choses nouvelle, moderne et forte. Oui, la république Française incarne l’idée de liberté offerte au monde. Oui La révolution française, malgré ses excès, était à ses débuts, un acte de générosité, … un acte de foi lancé aux nations du monde.
C’est pour cela que la République française est si importante aux yeux de tous les autres peuples. Elle donne le sens de l’histoire. Ou plutôt elle le donnait. Elle a montré le chemin,… le chemin de la liberté.
Les valeurs de la République n’ont pas régressé, c’est le regard que nous Français portons sur elle qui n’est plus le même. Son message aussi est resté identique, pourtant certains pensent que ce n’est plus le cas. J’aime souvent à répéter cet adage : « lorsque je m’ausculte je m’inquiète, lorsque je me compare, je me rassure ».
Quel autre pays propose une couverture sociale, chômage, retraite, médicale, de logements sociaux, d’éducation gratuite, d’aide, de subventions, plus importante que la France ?
Croyez-moi, il n’y en a aucun. Certains de nos voisins peuvent être plus pertinents sur une ou deux mesures, mais personne n’a d’approche, d’entraide et de solidarité comme la France.
Elle dit au plus faible d’une société, … à celui qui se trouve tout en bas … que la société ne peut pas l’abandonner.
Elle dit à celui qui a du talent et des qualités utiles à la société, … que la république doit justement lui donner toutes ses chances, de pouvoir grandir, et de s’élever.
La république, en ce sens, c’est aider ceux qui en ont besoin… c’est donner les moyens à ceux qui en ont les capacités quels que soient leur quartier d’origine ou leur niveau social.
Malheureusement, l’évolution des mœurs a fait que ces aides et ces soutiens sont devenus des dûs et finissent par se transformer souvent en assistanat. Il est en effet tellement plus simple de demander que de faire l’effort de réaliser.
Je le disais au début de mon propos, cette générosité, cette solidarité sont maintenant considérés par certains comme des droits sans jamais mettre en face aucun devoir. Nous devons donc impérativement revenir aux fondamentaux de la Révolution Française, à la déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Nous tous ici présents sommes les garants de ces valeurs, les Français plus que tout autre peuple doivent être les gardiens du temple de ces principes fondamentaux. Nous tous ici présents, pères, mères, fils, fille, grands-pères, grands-mères, devons être les vecteurs par lesquels sont transmises ces valeurs. Nous ne devons pas abandonner.
Nous devons éduquer nos proches, dialoguer avec eux, nous avons une mission si nous ne voulons pas que ce que nos aïeux ont bâti, ce que nous avons fait perdurer, ne disparaisse et laisse la place au chaos.
Afin de terminer ce propos sur une note positive, retenons aussi de cette crise, qu’il y a eu, à défaut de liberté, un formidable élan de solidarité de fraternité et d’égalité pendant cette période.
Les collectivités locales se sont investies et ont été présentes, les associations ont tenu leur rôle, une chaîne solidaire a vu le jour et a travaillé d’arrache-pied pour confectionner des masques, pour faire les courses, pour téléphoner à nos aînés, pour soutenir nos producteurs, nos commerçants, qui eux même sont restés ouverts, nous ont livré, nous ont dépanné, nous ont aidé. Que dire de l’état d’esprit fantastique qui a animé une partie de la nation, principalement l’ensemble de ses petites mains avec en première ligne nos soignants ? Comme en 1789, comme lors de la Révolution française, la solution et le sursaut sont venus d’en bas, de ceux dont on ne parle pas souvent. En 1789 ils ont créé la République, en 2020 et 2021, ils nous ont permis de passer cette crise sans connaître de pénurie. Lorsque l’on est réuni autour d’un objectif commun on est plus fort, plus soudé plus solidaires. Cela s’est passé pour la pandémie, il serait bon que cela soit le cas pour la réappropriation des valeurs de la République.
Elles sont toujours là, présentes, vivaces, plus que l’on aurait pu le penser, les gens qui les portent sont humbles, discrets, mais déterminés à ce que notre république se transforme, mais perdure en n’oubliant pas ses fondamentaux.
Je le dis aujourd’hui à nos jeunes. Pour vous aider à dessiner votre avenir, pas besoin de déboulonner des statues, pas besoin de casser de vitrines ou de manifester chaque semaine. Faites preuve de respect, envers les autres bien entendu, mais commencez par vous respecter vous-même et vos proches. Retroussez vos manches, pensez à la solidarité qui s’est exprimée, faites en preuve au quotidien. Là est le véritable esprit de la Révolution Française.
Vive Bormes les Mimosas
Vive la République
Vive la France".
____________ François Arizzi, maire de Bormes les Mimosas